En passant

Que faire de nos églises?

ParadisoSalle de concert Paradiso à Amsterdam – Source inconnue

Autrefois remplies à pleine capacité, les églises montréalaises sont désormais, pour la plupart, désertées. On estime qu’à Montréal, au début des années 2000, seulement 15% de la population âgée de 15 ans et plus participait aux services religieux sur une base hebdomadaire. Alors, si ce n’est pour accueillir les disciples et les croyants, à quoi bon peuvent nous servir ces édifices? Que pouvons-nous en faire?

En 2003, selon l’Inventaire des lieux cultes du Québec, Montréal compte 563 églises construites avant 1975. Sept années plus tard, une analyse publié par la Chaire de recherche du Canada en patrimoine urbain de l’UQAM révèle que 170 d’entre elles ont été converties alors que 70 autres, moins chanceuses, ont été démolies. Notons que près de la moitié de ces conversions et démolitions ont eu lieu dans les dix dernières années.En raison de la forte présence de communautés ethniques à Montréal, sur les 170 églises converties, 101 d’entre elles ont simplement vu leur fonction de lieu de culte se renouveler après avoir été achetées par une autre tradition religieuse. Parmi le lot restant, environ 17 ont fait l’objet d’un projet résidentiel et une quinzaine ont trouvé une vocation communautaire (ex : salle communautaire). Il y a donc eu très peu de projets créatifs. Pourtant, ce ne sont pas les idées et les possibilités qui manquent.Convertir pour le meilleur…et pour le pire
Montréal possède un potentiel considérable en matière de conversion d’églises. Malheureusement, jusqu’à présent, la créativité et l’audace se sont faites discrètes dans la métropole. Certains projets ont tout de même réussi à se démarquer, attirant même à quelques occasions l’attention des médias internationaux. Un des meilleurs exemples est sans aucun doute le Pavillon Marc et Claire Bourgie du Musée des beaux-arts de Montréal. Acquise au coût de 4,7 millions $, l’église patrimoniale Erskine and American située sur la rue Sherbrooke Ouest a été transformée par le Musée en une merveilleuse salle de concert de 444 places à laquelle a été greffée une annexe servant de pavillon pour l’exposition permanente.Un deuxième exemple qui mérite d’être mentionné est l’église de l’Ascension sur l’avenue du Parc dans le quartier Mile-End, convertie en bibliothèque au début des années 1990. Encore une fois, le design proposé s’harmonise très bien avec la structure d’origine du bâtiment tout en s’adaptant aux nouvelles fonctions de l’édifice.

À l’opposé, le projet de condominiums Place de la Croix dans la Petite Italie aura suscité tout un tollé auprès des Montréalais qui ont vite fait de décrier le manque total de logique architecturale du projet. Même les architectes et les promoteurs ont avoué après coup qu’ils ne recommenceraient pas l’expérience.

Il est toutefois intéressant de souligner que les prix du marché immobilier montréalais sont encore trop faibles pour compenser les coûts exorbitants reliés à la conversion et à l’entretien d’une église en tant que projet résidentiel. Par exemple, cinq ans après la mise en marché du projet, sur les trois unités d’habitation construites dans l’ancienne église Rosemont Central sur la 4e avenue, seulement une unité avait trouvé preneur. Ainsi, nous pouvons supposer que la conversion d’églises en projets de condos ne devrait pas trop s’imposer à Montréal, du moins pas pour l’instant. Cependant, plusieurs autres possibilités s’offrent à nous. Des possibilités qui ont même déjà fait leurs preuves ailleurs dans le monde.

Salle Bourgie – Photo Paul Boisvert


Des projets à envier

Montréal n’est pas la seule ville à voir ses édifices religieux être abandonnés et transformés. De Dublin à Singapour, les conversions d’églises sont de plus en plus chose courante. On les retrouve souvent dans les magazines et sites Web de design.

Hôtellerie
Évidemment, difficile d’imaginer la facture des travaux derrière l’hôtel Kruis Heren à Maastricht aux Pays-Bas, ni celle du Martin’s Patershof à Malines en Belgique. Les résultats demeurent toutefois impeccables. Peut-être pourrions-nous développer un hôtel boutique plus sobre dans une église de taille plus modeste?

 Hôtel Kruis Heren à Maastricht (Pays-Bas)

Bibliothèque 
Tel mentionné précédemment, celle du Mile-End a été un succès. Pourquoi ne pas en ouvrir d’autres? Un exemple époustouflant: le projet Seleyx Dominicanen Maastricht. Réalisé par le studio d’architecture Merkx + Girod, la bibliothèque prend place dans une ancienne église dominicaine à Maastricht, cette même ville hollandaise où on trouve le Martin’s Hotel mentionné précédemment.

 

Bibliothèque Seleyx Dominicanen Maastricht (Pays-Bas)

Restauration 
Il n’y a pas qu’en Occident qu’on retrouve des conversions d’églises réussies. En Orient aussi. À Singapour, en plus d’être très populaire pour son menu gourmet, le restaurant White Rabbit est un bon exemple de réussite de réaménagement, tout comme le resto-bar-discothèque The Church, à Dublin.

Resto-Bar The Church –  Dublin (Irlande)

 

Salle de concert
Les groupes musicaux Arcade Fire et Death Cab For Cutie ainsi que la chanteuse Patti Smith ont démontré aux Montréalais à quel point un concert dans une église, ça ne se limite pas juste à des solos d’orgues. Dans les années 60, Amsterdam a pour sa part vu naître le Paradiso, une salle de concert désormais incontournable de la capitale des Pays-Bas.

Billet originellement publié sur le blogue d’Urbania